Bonjour,
Collectionneurs et mécanos, nous avons eu l’occasion d’acheter et de restaurer mécaniquement une ADLER 5-8 type H utilisée par un artisan fabricant de cartables entre les années 30 et 70. Restée 40 ans inutilisée, la machine n’était plus fonctionnelle.
Nous avons également restauré une ADLER 4-1 pour un artisan fabriquant des sacoches motos et des étuis de fusils en cuir épais, cousus avec de la tresse poissée de 1,5mm.
Très fortement inspirées mécaniquement des SINGER 45, les ADLER classe 4 (piqueuses plates ADLER classe 5 (piqueuse à bras) sont des machines moyennes à crochet « navette baril » destinées à la fabrication d’articles en cuir, la sellerie, le travail de matelassage et d’orthopédie, dans des ateliers de maroquinerie, des ateliers de chaussures, des ateliers de chemins de fer etc.
Pour répondre aux besoins spécifiques, ADLER a décliné la classe 4 en 5 sous-classes et la classe 5 en 10 sous-classes.
Sur demande et moyennant supplément de prix, ADLER proposait 4 options originales :
- Pied accompagnateur : tout en pressant l’ouvrage sur la griffe, le pied suivait son déplacement pour éviter la cambrure ou le fronçage de l’ouvrage ou encore éliminer le frottement de l’ouvrage sous le pied presseur susceptible de réduire la longueur de point.
- Réducteur de vitesse par train d’engrenage pour piqûre d’articles particulièrement durs.
- Pour la Classe 5 uniquement, système d’entraînement supérieur par contre-pied entraînant. Pas de griffe mais ce contre-pied entraînant l’ouvrage en crochetant exactement le trou d’aiguille. Piquage sans marquage et en bord pour les soufflets de serviettes ou les poignées de valises rembourrées (couture du genre « petit point »).
- Enfin, l’option « H » (« hand » signifiant « main » en allemand), un dispositif permettant d’obtenir des coutures d’aspect très similaire à la couture sellier main.
Attention : les sous-classes 5-36 et 5-39 ne comportent pas d’entraînement et ne permettent donc pas de coudre. Telle la SINGER 133K13, ces 2 sous-classes sont des machines de réparation, reprisage et rapiéçage de bâches, sacs etc.
A l’exception des sous-classes 4-1, 4-23a (spéciale bordage de tapis), 5-25 (ballons de cuir et soufflets wagons et embarcations en toiles étanches enduite caoutchouc) et la 5-25 Mo (spéciale mocassins) les ADLER classes 4 et 5 disposent de la marche arrière.
Si ces classes 4 et 5 sont des machines « moyennes », la classe « lourde » existait uniquement en version plate, l’ADLER classe 20 : 47 cm de passage sous bras, grand crochet, canette grosse capacité. Poids de la tête uniquement : 85kg…
Au début des années 50, aux classes 4 et 5 succèdent les classes 104 et 105 introduisant dans certaines sous-classes un vrai double entraînement puissant par griffe et pied actif ou bien griffe et aiguille.
L’avatar « triple entraînement » (brevet SINGER années 50) apparaîtra à la fin des années 70 avec les modèles ADLER 204 et la mythique ADLER 205-373 / 205-370.
Pour information, ADLER KOCHS et DURKOPP fusionneront en 1990. Une machine estampillée ADLER KOCHS est donc forcément antérieure.
Notre avis sur l’ADLER 5-8 « h » et l’ADLER 4-1.
Nous avons restauré intégralement ces 2 machines. Malgré des dizaines d’années d’activité soutenue entre des mains assez soigneuses, les machines sont très peu usées.
La restauration consiste en un démontage intégral en vue de dégommer chaque pièce, la contrôler, la rectifier (remise à la côte) et la remonter avec réglage. Augmentation du passage sous pied et de l’épaisseur à coudre.
Note : d’origine, pas de système de libération de la tension du fil avec relevage du pied.
Le canon est un mécanisme compact donc plus sujet à l’usure (le point sensible est toujours le mécanisme de commande excentrique de la griffe qui concentre les saletés et qu’on oublie facilement de huiler) quelle qu’en soit la marque. Sur cette 5-8, usure légère de la cage, sans incidence sur la régularité du point. Sciage par le fil de tous les guide-fils et passages de fil etc.
La 104, version plate, est encore plus robuste. Aucune usure apparente.
La 5-8 ne peut pas être équipée d’un pied-roulette (si pratique pour les piqûres en courbe) car elle est équipée du système de pied accompagnateur passif. Cet intéressant système permet de presser fortement et par conséquent de bien entraîner sans toutefois freiner l’ouvrage ni le marquer.
Ce dispositif est blocable en pied ordinaire. Système un peu bruyant (claquements) mais pas sans charme.
La 4-1 possède une barre de pied presseur classique et peut être équipée d’un pied roulette. Mécanique très semblable à la SINGER 45.
Une fois restaurées, ces 2 machines piquent parfaitement, leurs points sont de très haut niveau esthétique et en termes de solidité.
Couture possible avec aiguilles système 328 de 140 à 300, fil de 30/3 à 5/3. Le point « sellier main » de la 5-8 « h » est splendide.
Nous avons réglé la 4-1 pour piquer avec de la tresse poissée (très collante) de 1,5mm inutilisable sur les « triples entraînements » 205-370 ou JUKI TSC 441. Très solide couture esthétiquement parfaite mais à réaliser à vitesse réduite (150 pt/mn max).
Sur les 2 machines, nous avons augmenté la hauteur de passage sous pied et augmenté un peu l’épaisseur à coudre (17 mm) permettant de réaliser de généreuses poignées de cartable par exemple.
Nous avons vendu la 5-8 restaurée robe d’origine avec un jeu complet de pieds sellerie et accessoires d’origine au prix de 1200€. Châssis à pédale (souhait de l’acheteur), moteur à embrayage livré à part.
Quant à elle, la restauration/préparation de la 4-1 avec démontage complet et mise au point pour tresse poissée a été facturée 600€.
Ces machines sont d’excellents choix réalistes qui, parfaitement réglées, sont bien adaptées pour l’amateur mais aussi pour l’artisan car ce sont des machines de production relativement performantes (dans sa brochure, ADLER annonçait une cadence possible de 200 cartables/8h avec la 5-5 !).
Les crochets sont toujours disponibles à prix modique. Les pièces mécaniques internes ne sont plus disponibles. Donc en cas de besoin, réparation ou refabrication.
Avant achat, la machine doit être inspectée avec attention sur les points suivants :
Essai de couture ;
Jeu de la griffe à contrôler au doigt (gauche/droite et avant/arrière) surtout pour les modèles canon. En cas de jeu, irrégularité du point, point raccourci. Remise en état des pièces uniquement plusieurs centaines d’€.
Coursives du crochet (anneaux ouverts en acier) : en cas d’usure importante, pas de prise de boucle, le fil supérieur se coince…
Contrôler tout le chemin de fil et rechercher les zones de sciage par le fil pour les éliminer. Attention au trou du doigt releveur.
Pour le coup d’œil, voici une vidéo de notre Adler 5-8H montrant bien le pied accompagnateur et la qualité du point :
https://www.youtube.com/watch?v=VGftVCSkep8
Photos suivent, notamment comparaison des piqûres entre l’Adler 5-8H, la Dürkopp-Adler 205-6 (simple entraînement), la Dürkopp-Adler 205-370 et la Juki TSC-441.